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Alfred Pellan

Costumes d’Alfred Pellan pour « La Nuit des rois » de Shakespeare

La rencontre entre le père Émile Legault, directeur des Compagnons de Saint Laurent et l’artiste peintre de renommée mondiale Alfred Pellan mènera à la réalisation d’une flamboyante scénographie qui marqua l’histoire du théâtre au Québec : Le soir des rois de William Shakespeare (1946). Nous proposons donc d’analyser cette production, ainsi que sa reprise intitulée La nuit des rois (1968), à travers les costumes d’un seul personnage, celui de Viola. Ces derniers ne sont pas les plus spectaculaires qu’a dessinés Pellan mais ils demeurent particulièrement intéressants à étudier en raison de l’ambiguïté du travestissement du personnage qui se reflète non seulement dans le texte de Shakespeare et le jeu de l’actrice, mais également dans les choix du scénographe. Les vêtements du personnage se sont alors démarqués tant dans ses habits masculins que dans les toilettes féminines. La démarche de Pellan était alors profondément singulière et originale pour le Québec de l’époque.

Les toiles de fond et les costumes de Pellan ont toutefois pris une importance démesurée par rapport au reste de la production et sont désormais exposés dans les musées davantage comme des artefacts culturels et des œuvres picturales que comme des éléments d’une scénographie.

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La pièce a été présentée à la Salle du Gesù à Montréal, du 21 mars au 6 avril 194617. Pellan a alors conçu les costumes, mais également les décors, les maquillages, les meubles et les accessoires de la production18. Six toiles de fond ont été peintes par l’artiste avec l’aide de ses étudiants de l’École des Beaux-Arts de Montréal. Ces six tableaux, extrêmement colorés, n’évoquent aucun lieu réel, mais suggèrent plutôt une rue, le jardin d’Olivia ou la demeure d’Orsino. Nicole Clément affirme même que « dans les décors, il n’est pas question de structuration de l’espace scénique, au contraire on assiste à un aplatissement de celui-ci. C’est l’effet tableau et non l’effet scénique qui ressort de l’ensemble19. » L’effet tableau du décor se retrouvera alors en rapport avec les costumes. L’organisation presque picturale – à défaut d’être scénique – s’organisera dans le contraste des couleurs du costume avec celles de la toile.

Les costumes obéissent à la même logique des formes géométriques, des ornementations ou des motifs que dans l’art pictural, créant une atmosphère proche de celle du cirque. Les personnages dits ridicules portent des costumes de bouffons : le gourmant Sire Tobie porte des rembourrures sur lesquelles sont peintes une fourchette et un couteau, alors que le pitre Feste est coiffé d’un tricorne pour le moins farfelu où l’on trouve trois visages aux expressions différentes à l’extrémité de chacune des cornes. L’uniforme quasi futuriste des officiers ressemble pour sa part davantage au costume d’un super-héros de bande dessinée qu’à un personnage shakespearien.

Le jeu avec les formes mêmes du costume par des rembourrures, des excroissances ou des effets d’aplanissement constitue un ensemble très particulier. Les couleurs et les motifs qu’utilise Pellan créent une texture unique, la scène devenant de ce fait une œuvre picturale en trois dimensions. L’originalité et l’avant-gardisme des costumes et leur interaction visuelle avec les toiles de fond se rapprochent d’un style surréaliste ou d’un psychédélisme avant la lettre.

Les costumes ont cependant été difficiles à réaliser et le passage de la maquette au costume ne s’est pas fait sans heurts. Le manque de temps obligea Pellan à peindre certains motifs, tels que les formes géométriques, les lignes et les tourbillons, directement sur les costumes. Si ce choix amplifie l’effet de tableau vivant, cette technique accuse toutefois des ratés en raison de la surcharge des motifs qui auraient été avantagés s’ils avaient été cousus au lieu d’être peints. La couture des ornements sur les costumes aurait apporté une précision et une meilleure composition du dessin, sur lequel Pellan s’emportait en alourdissant souvent le vêtement de formes superflues. Cette surabondance de couleurs, de motifs et de textures se retrouve d’ailleurs dans la plupart des éléments de la scénographie.


Costumes et sérigraphies inspirés de cette pièce

Pellan & Shakespeare: le théâtre des rois

Olivia
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La pièce a été présentée à la Salle du Gesù à Montréal, du 21 mars au 6 avril 1946. Pellan a alors conçu les costumes, mais également les décors, les maquillages, les meubles et les accessoires de la production. Six toiles de fond ont été peintes par l’artiste avec l’aide de ses étudiants de l’École des Beaux-Arts de Montréal. Ces six tableaux, extrêmement colorés, n’évoquent aucun lieu réel, mais suggèrent plutôt une rue, le jardin d’Olivia ou la demeure d’Orsino. Nicole Clément affirme même que « dans les décors, il n’est pas question de structuration de l’espace scénique, au contraire on assiste à un aplatissement de celui-ci. C’est l’effet tableau et non l’effet scénique qui ressort de l’ensemble.» L’effet tableau du décor se retrouvera alors en rapport avec les costumes. L’organisation presque picturale – à défaut d’être scénique – s’organisera dans le contraste des couleurs du costume avec celles de la toile.

Costumes Feminins

Olivia – Robe
Maria – Robe
Viola – Robe
Suivante – Robe

Costumes masculins

Valentin – Pantalon, veste, chemise sans manches
Malvilo – Combinaison
Fabien – Pantalon, veste, chemise
Le Fou – Pantalon, veste
Sir Tobie – Combinaison
Sir Andre – Pantalon, veste
Curio – Pantalon, veste, chemise sans manches
Sebastien – chemise sans manches
Antonio – Combinaison
Soldat – Combinaison, chemise
1er Officier – Combinaison
2em Officier – Combinaison
Matelot – Pantalon, veste
Capitaine – Pantalon, veste
2e Gentilhome Pantalon, veste, chemise sans manches
3e Gentilhome Pantalon, veste, chemise sans manches

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Officier
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œuvres
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